L’excellence vocale des Métaboles

12/09/2019
Resmusica - Michèle Tosi
The Angels au Festival de Royaumont

Léo Warynski et Les Métaboles ont choisi de faire dialoguer les œuvres du passé avec celles du présent, dans un concert qui amorce leur résidence de trois ans à la Fondation Royaumont.

Le programme est ambitieux, convoquant les instances sacrées, avec Byrd, Palestrina, Purcell et la musique chorale du Britannique Jonathan Harvey. L’Ave verum de William Byrd donne le ton, dans la perfection du contrepoint renaissant et le temps circulaire propice à la contemplation, qu’aucune pièce de la soirée ne viendra vraiment perturber. Même si s’exprime, à travers les pages chorales d’Harvey, une ferveur que nous communiquent ce soir Les Métaboles : dans Plain Songs for Peace and Light notamment, où le compositeur, habité d’une pensée électronique, écrit la ligne vocale et sa réverbération dans l’espace. L’aura résonnante des voix de femmes et le raffinement des textures obtenues au sein des pupitres nous enchantent. Come Holy Ghost, invoquant le feu céleste, est une des pièces les plus étonnantes, débutant par l’intonation grégorienne et laissant apprécier la couleur et la flexibilité des voix de l’ensemble, dans une écriture qui se complexifie sans perdre sa transparence.
En latin cette fois, le Stabat Mater pour double chœur de Palestrina, entendu dans la plénitude des voix, nous impressionne, par l’impeccable prononciation du texte et le rythme fluide que lui confère Léo Warynski, sensible à toutes les variations de l’écriture. Non moins fluide est le passage de Purcell (Remember not, Lord, our offenses) à Harvey (Remember, O Lord), les deux pièces s’originant sur la même intonation. La création mondiale de Jack Sheen, autre lauréat de Voix Nouvelles 2018 ayant bénéficié d’une commande, est donnée juste avant. Fitzgerald pirouette pour chœur spatialisé est une pièce subtile et sensible, invitant à une écoute immersive au sein d’un temps long où, imperceptiblement, les choses se transforment. Au mitan de l’œuvre, une source sonore extérieure (provenant des smartphones des chanteurs) modifie sensiblement le paysage sonore sans l’affecter profondément. Léo Warynski veille aux dosages et à l’équilibre des forces, dans une interprétation remarquable, laissant advenir le mystère et la profondeur.
En bis, et dans un élan plus spontané encore, le chœur rechante, Remember O Lord et The Angels pour double chœur, deux bijoux de Harvey aux contours ciselés et magnifiés ce soir par l’excellence vocale des Métaboles.