... un charme, une chaleur, un tact, bref une humaine intelligence qui atteint sa cible en plein mille

Mercredi 17 mars 2021
ConcertClassic- Alain Cochard
Liebeslieder Walzer

Léo Warynski et les Métaboles nous gâtent ! Tandis que vient de paraître un magnifique enregistrement intitulé « The Angels » (NomadMusic) – une réussite sur laquelle nous reviendrons bientôt –, le chef et ses chanteurs étaient à la salle Cortot au début du mois pour un programme Liebeslieder Walzer dont la création a eu lieu dans le cadre du Festival de Royaumont, le 20 septembre dernier. Pour ceux qui l’avaient manqué, comme ceux qui l’ont déjà savouré, le bonheur était grand de le retrouver dans le cadre d’un concert diffusé en direct sur la plateforme Recithall.  
 
L’intitulé pourrait faire accroire que Les Métaboles donnent l’intégrale des Liebeslieder Walzer (Op. 52 & 65) de Brahms ; il n’en est rien. Léo Warynski s’est limité à l’Opus 52 et s’en est servi comme point de départ à la construction d’un programme ouvrant sur des aspects bien plus rares de la production chorale de Brahms – sûrement l’un des pans les moins connus de l’œuvre du musicien allemand. Et de choisir deux des treize Canons op. 113 (les nos 7 et 13), les Quartette op. 112a, les Gesänge op. 42 ou encore les Quartette op. 31 pour précéder le cahier op. 52.

Inspiré par le thème de Der Leiermann, dernière pièce du Winterreise schubertien, le Canon op. 113 n° 13 sur un poème de Rückert « Einförmig ist der Liebe Gram » (le chagrin d’amour est monotone) introduit de façon mystérieuse et prenante l’auditeur dans un labyrinthe qui se prolongera jusqu’aux Liebeslieder Walzer, placés en conclusion. De part en part, l’oreille est séduite par la qualité de la réalisation, tant en ce qui concerne l’intonation que la souplesse de la phrase, l’équilibre entre les lignes et le relief apporté au texte musical. On n’est pas moins admiratif du sens de la caractérisation avec lequel chaque pièce est explorée, qu’il s’agisse de compositions de jeunesse, pleines de charme, tel l’Opus 31, ou de réalisations tardives, et, bien évidemment, dans la première série des Liebeslieder Walzer que Warynski et ses chanteurs abordent avec un charme, une chaleur, un tact, bref une humaine intelligence qui atteint sa cible en plein mille.
 

À cette justesse du propos, la présence pour l’accompagnement des chanteurs d’un piano Streicher de 1847 (prêté par La Nouvelle Athènes), que se partagent Yoan Héreau et Benjamin d’Anfray, apporte beaucoup par la dimension intimiste de la sonorité – parfaitement en situation dans la merveilleuse acoustique de Cortot. Un instrument qui, à quatre mains, permet deux très opportunes parenthèses pianistiques avec les Danses hongroises nos 1 et 2 et quelques valses tirées de l’Opus 39.
 
Espérons que la reprise de Liebeslieder Walzer, prévue au Floréal musical d’Epinal le 21 mai, pourra se dérouler devant un public nombreux. Pour l’heure, il faut encore compter sur le streaming : c’est par ce biais que Léo Warynski et Les Métaboles donneront le 25 mars le concert de sortie du disque « The Angels », en direct de l'abbaye de Royaumont où ils sont en résidence.